Immaturité digitale ou culture de la lose
Formation, recherche, données publiques, engagement de l’Etat … la France est loin d’être la voiture-balai du numérique qu’elle aime revendiquer. Mieux, elle peut aujourd’hui assumer une forme de leadership comme le souligne la récente étude sur la « maturité digitale de l’entrepreneuriat français – MEDEF / BCG ». Reste que pour convaincre les entreprises de monter sur le podium, un grand quart des entreprises sont attendues sur d’autres leviers stratégiques. Qui évoquent aussi la volonté propre de se transformer.
Il y a probablement en France, une certaine culture de la lose héritée du Baron de Pierre de Coubertin et au sein de laquelle, l’essentiel peut se résumer à une participation anecdotique. Le Dieu du business ne reconnaissant pas les 4ème, les français peuvent continuer de s’autoflageller, ce pays forme pourtant de nombreux talents chaque année. Problème, nombre d’entre eux, les études achevées, se font aspirer par des écosystèmes qui sévissent au-delà des frontières de l’hexagone.
Pire, un déficit d’environ 200.000 talents digitaux est attendu d’ici 3 ans.
Si les préconisations en la matière vont de l’évolution du droit du travail à l’évaluation des compétences, via une sorte de TOEFL du digital, le désir d’ailleurs pousse aussi à se préoccuper de l’incurie digitale.
En assistant à la remise du Prix Etienne Marcel au Sénat, il est relativement aisé de constater le talent monstrueux des PME françaises. De la ferronnerie d’art qui vient s’afficher devant les plus beaux bâtiments de France. A la gastronomie héritée de génération en génération, le savoir-faire ne semble plus une revendication mais le faire savoir reste une urgence. Quel plaisir de voir aussitôt les félicitations passées, ces mains calleuses tweeter leur mise à l’honneur.
Mais pour un artisan converti, combien de chefs d’entreprises de PME s’engagent à incarner la vie numérique de leur entreprise ?
Transformer l’économie traditionnelle, par le biais de la formation, vers le digital est donc l’un des correctifs proposés pour permettre à nos PME d’émerger. De la même manière, l’attractivité des écoles pourrait se renforcer en incluant des cursus digitaux. On regrettera toutefois, l’accent mis sur la technique (cybersécurité, développeurs) lorsqu’il aurait fallu évoquer avec autant de force, le marketing et la communication.
Faire sans faire savoir étant indubitablement voué à l’échec.
Car si, au final, nous souhaitons développer des pépites de taille mondiale d’ici 5 à 10 ans, encore faut-il dévoiler le talent de nos précieuses entreprises :
– En repensant la formation digitale comme un levier de croissance durable et non comme une vulgaire opportunité prise en charge. Combien de journées de formations perdues car non suivies à moyen terme ?
– En inversant la prise de risque sur les acteurs financiers et non sur l’économie réelle. Combien de TPE/PME non financées car elles n’entrent pas dans la case de la start-up nation mais la finance (sic) ?
– En inscrivant la culture entrepreneuriale très tôt dans le cursus scolaire. Non comme un dogme mais comme de nouvelles libertés d’imaginer et de s’épanouir.
– En annulant la dette de la lose qui pèse sur nombre de dirigeants. Combien d’entrepreneurs méconnaissent l’atout d’un coaching qui saura cultiver valeurs et bénéfices ?
– En comprenant que les mutations technologiques doivent impliquer aussi des mutations en terme de communication. Combien de PME devront nous encore perdre … car elles ne s’expriment pas !