RadioHead, des poils, des fake
L’histoire retiendra donc qu’il y eu deux « fake » coup sur coup. Comme il y eu tant d’ados par générations attardés par l’ennui, ceux de la notre firent donc claquer l’acteur Jean Dujardin. Ce fût le premier et dans un démenti de fibre nationale, la toile a vite renvoyée les crétins au décomptage de leurs premiers poils.
Le second « fake », nettement plus vivace, puise sa source dans le dernier album de RadioHead « King of the limbs ». Dans les milieux autorisés à critiquer le dernier opus précipitamment expulsé des studios s’est donc fait salement tailler. Un faux? Oui, pour le prestige accordé à la marque de Thom Yorke. Un faux, comme un mensonge suscité par l’attente et l’emballement du verdict.
Dans un « Tout ça pour ça », Thomas Burgel des Inrocks ouvre le bal et prévient ces lecteurs les plus libidineux. « C’est fade, vaguement fade. Pas raté, pas génial pour autant. Pas de surprise, l’excitation en berne, les hormones au repos ».
Chez Rue 89, moins adepte de la chronique musicale, François Krug s’auto « out » de sa détestation du groupe d’Oxford et s’en donne à coeur joie :
« Radiohead, c’est en somme un Coldplay que les branchés n’auraient pas honte d’aimer, ou un Aphex Twin qui plairait au grand public ».
Et si Zik Zag d’Emannuel Marolle veut bien voir un vrai « bijoux » concernant le titre « Codex ». Pour l’ensemble, ce ne sont que « Des bouts de chanson, des tentatives de faire croire que Radiohead continue à explorer des terres inconnues, mais tombe vite dans des impasses ».
Oui après le génialissime « Ok Computer », le virage électro du groupe d’Oxford à pu décontenancer certains adeptes de la tournure des événements. Des morceaux à rallonges, tels d’inévitables tentatives psychédéliques sans relances particulières. Des torsions dans l’exercice du « tube » pour ne faire naître que des expériences. Comme si le public était soudainement devenu cobaye.
Mais a s’y pencher d’un peu plus près, c’est moins sur la musique que sur le processus de commercialisation de cet album que la critique joue sa meilleure partition.
Krug s’échinant dans sa détestation. « Ce disque d’un ennui mortel pourrait en effet être celui qui prouvera, une bonne fois pour toutes, que l’intérêt de Radiohead ne réside pas dans sa musique, mais dans ses techniques de vente ».
Zik Zag rappelant avec insistance le poids de RadioHead dans l’industrie du disque. « Avec sa nouvelle façon de se vendre, Radiohead ne démocratise pas la musique. Il la dévalorise avec des disques de plus en plus médiocres ».
Burgel s’acharnant même à comparer Thom Yorke à… Joseph Staline. « On rappellera que cette destruction généralisée, volontaire et programmée des corps intermédiaires peut tendre, philosophiquement, vers le totalitarisme ».
En privilégiant un circuit court, du créateur au public, RadioHead coupe autant l’herbe à l’industrie musicale qu’à son pendant médiatique. Renvoyé à un processus d’égalité qu’elle juge populiste, la critique musicale s’échine la plume au travers d’un exercice qu’elle ne maîtrise pas tout le temps. Car si RadioHead a certes produit un album moyen, un célèbre critique barbu, plus vrai que « fake », ne disait il pas :
« De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ».